Le vent souffle tranquillement. Le soleil est comme endormi. Sur le visage altéré des proches, les larmes coulent à flots. Vocifération. Agitation. Des voix enrouées et étranglées par des sanglots résonnent sur le site comme une musique de fond.
Les proches d’un homme ayant laissé quinze enfants sont insoutenables. Le disparu était le pourvoyeur du foyer. Deux frères jumeaux tués dans le drame laissent leurs parents dans une profonde angoisse. Ces réactions éprouvantes ne laissent personne insensible. A un certain moment, la cérémonie est devenue crispante. Des personnes sont évanouies. D’autres ne pouvant plus tenir sont emportées par les membres de la protection civile. La tristesse et l’affliction traversent la foule et planent sur toute une ville en détresse. Le célébrant principal, l’Archevêque Yves Marie Péan, invite les familles à se consoler et à penser également à la fragilité de leur vie. « La vie est fragile et courte. Nous sommes des passagers. Il s’agit donc, frères et sœurs, d’être vigilants », a conseillé le prélat. Il a saisi cette occasion pathétique pour inviter les autorités à mettre plus de rigueur et d’ordre dans la gestion du pays. M. Péan estime que ces dispositions éviteront la répétition de ces évènements dramatiques.
Abner Georges, porte-parole des parents des victimes, appelle les autorités à prendre leurs responsabilités. Il demande aux politiciens malintentionnés de se tenir à l’écart pour ne pas entraver le travail de la justice. « Les parents ne doivent pas être victimes une seconde fois. Nous allons toute nos forces pour que ce drame ne reste pas impuni », a déclaré le porte-parole. Au nom de toutes les victimes, il réclame un accompagnement des autorités. « Si rien n’est fait, des enfants n’iront plus à l’école. Et, la délinquance juvénile connaitra une hausse », a prévenu M. Georges.
Dans ses mots de circonstance, le Chef de l’Etat, M. Jovenel Moise, a renouvelé ses sympathies aux familles éplorées. Le président s’engage à transformer le secteur du transport haïtien. Il promet de remettre en place le service d’inspection qui existait dans le temps. « Nous ne pouvons pas laisser mourir tous nos compatriotes dans des accidents de la route », a indiqué le garant des institutions nationales.
Le président encourage les autorités judiciaires à poursuivre le chauffeur du bus impliqué dans le drame. « Le chauffeur un acte criminel. Il doit être poursuivi », a soutenu M. Moïse. Les représentants du secteur vodou ont énergiquement dénoncé leur exclusion de la cérémonie. Ils étaient de simples invités. Le président national de l’organisation Zanfan Tradisyon (Zantray), M. Hervé Germain, a qualifié de « crime » l’attitude des autorités. Pour Me Enock Génélus, cet acte est une « discrimination ».
Après la cérémonie, les dépouilles ont été restituées à leurs familles. Les autorités parlent de trente cercueils. Mais, seulement vingt-six sont remarqués sur l’estrade construite à cet effet. Jusqu’à présent, le nombre exact des victimes reste inconnu.
Jodherson Cadet