Une sonnerie retentit et la lourde porte qui sépare l’intérieur de l’extérieur se déverrouille. Nous pouvons donc accéder à la Maison d’Arrêt pour Femmes (MAF). Pour l’occasion, les deux détenues venues chercher leur diplôme se sont mises sur leur trente et un. Robe de soirée pour l’une et tailleur pour l’autre, toutes deux ont décroché le Certificat d’Aptitude Professionnelle avec comme spécialité Couture Métiers de la Mode-Vêtements flous. Les deux lauréates sont très fières de montrer leurs diplômes.
Chez les hommes, l’ambiance est beaucoup plus décontractée. Une vingtaine de détenus sont présents dans la bibliothèque de l’établissement pénitencier. La solennité de l’instant se ressent lorsque Camille Galap remet le fameux bout de papier aux étudiants couronnés de succès. La plupart repartent avec un CAP en maintenance de matériel option parcs et jardins ou un CFG pour Certificat de Formation Générale.
L’un des lauréats se distingue. Nous l’appellerons Pierre, il a obtenu son Bac techno en sciences et technologie de management et gestion en spécialité ressources humaines et communication. Ce baccalauréat a été préparé dans des conditions bien particulières : « J’ai préparé mon baccalauréat tout seul, sans professeur de lycée en six mois. Du mois de janvier au mois de mai, j’ai passé de nombreuses nuits blanches à réviser avec très peu de lumière. À un moment, nous étions six dans la cellule. Les autres fumaient et laissaient la télé allumée toute la nuit. Pour moi qui suis non fumeur et qui essayait d’obtenir la mention très bien, ça a été très difficile. »
Avec 11 de moyenne, Pierre aura raté sa mention mais pas perdu du tout le moral ni la détermination : « Je veux poursuivre mes études universitaires mais ici c’est pas possible. J’ai donc décidé de me faire transférer dans un autre centre pénitentiaire où je pourrai suivre des cours d’études supérieures. Mon mental me permettra d’obtenir une licence en assistant gestion PME-PMI et une autre en communication. Cependant, je trouve dommage que l’on soit si peu récompensés. J’aurais aimé que les juges soient là, qu’ils voient le résultat de nos efforts. »
Pierre, pour bien connaître la prison, a des idées pour améliorer les conditions de détention et inciter un maximum de jeunes à se présenter aux examens: « Il faudrait élargir le choix des diplômes proposés. Par exemple, permettre aux jeunes de préparer le CAP carrosserie ou mécanique. C’est ce qui les passionne, on attire pas les mouches avec du vinaigre, il faut donc les inciter à travailler sur des domaines qui les intéressent. » Le recteur lui répond que c’est en cours de discussion avec Nourredine Brahimi, le directeur, mais que le fait d’introduire du matériel dans l’enceinte de la prison peut être problématique. Pierre a eu une réponse dont seule la logique dépasse l’utopique poésie « Il faut savoir rendre possible ce qui est nécessaire ». Sauf que pour le ministère de l’Éducation nationale francais et celui de la Justice, les budgets baissent toujours plus que de raison.