Basse-Terre. Capitale. Samedi 12 aout 2023. CCN. Comme chaque année à la période dite de “vacances”, CCN propose à ses lecteurs une sélection d’ouvrages dont les auteurs ont tous été reçus et donc interviewés au cours des mercredis littéraires du #ZclNews
“Konparezon” de Michel Melange. Edition Neg Mawon. 260 pages.
L’auteur a été professeur de Kréyol, il sait donc de quoi il parle. Son ouvrage est essentiel, indispensable, pour tous les créolophones (profs, élèves, débutants…) car il s’est appuyé sur sa connaissance de la langue. Les nombreux travaux et ouvrages existants de H. Poullet, de Benzo, de S. Catalan, S. Telchid et réalisé plus qu’un dictionnaire, une sorte de lexique comparatif (konparézon). Des mots et expressions de notre langue avec pour la plupart assortis des explications qui aident à leur compréhension contextuelle et une utilisation immédiate. D’un point de vue sémantique métaphorique et purement linguistique, cet ouvrage est d’une importance capitale pour tous les usagers de notre langue nationale. A titre d’exemple prenons à dessein le mot konparézon
konparézon
kon kongo ki vwè kalson
kon kouli malaba
Géopolitique des Outremers de Fred Constant. Editions le Cavalier Bleu. 200 pages.
Ancien ambassadeur à la coopération régionale dans les Caraïbes, prof de science politique à l’UA, Fred Constant maitrise parfaitement son sujet et permet de bien comprendre toute la française, à l’égard de ces dernières colonies qu’on appelle toujours et à tort “ les “outremers”. Cet ouvrage bien documenté peut être lu et même interprété comme une vraie (re) mise en cause réelle du système colonial français contemporain ; Tout est passé au crible y compris la fameuse “puissance maritime française”, qui ne repose en fait que sur l’existence et la domination de ces territoires que sont nos pays toujours en en situation coloniale. Cette citation extraite de la préface est éclairante : “les outremers demeurent perçus comme des étrangetés périphériques, plus ou moins éloignées et exotiques, que l’on regarde avec étonnement et surprise mais que l’on ne considère pas…”
Ou encore : “ La France qui dispose de la deuxième plus grande ZEE après celle des USA, le doit à ses outremers qui lui apportent 97% de sa superficie soit 1 0.540727 Km2”. A la lecture de cet ouvrage très pointu et éclairant sur la géopolitique, on peut se demander que sera la France quand elle aura perdu ses colonies et donc sa puissance maritime
“Lettre d’une future ancêtre à ses afrodescendants” de Maryse Isimat Mirin. Collection ancestralité. 140 pages
Au moment où la problématique de” l’afrodescendantalitude” est devenue, une question récurrente dans notre société, l’ouvrage de Maryse I. Mirin est comme une forme réponse à toutes ces questions.
Pourquoi une quête vers les ancêtres ? comment embrasser et dépasser nos mémoires collectives ? L’autrice qui est psycho-relaxologue et thérapeute va jusqu’à proposer à la fin de son essai des suggestions pour une pratique de « développement personnel » cela suppose que ce livre dépasse le cadre théorique de la quête ancestrale et tente de proposer comme une méthode aux afrodescendants qui veulent trouver leur estime de soi.
“Autopsie d’un crash aérien : 22 juin 1962”. Deshaies, Guadeloupe sous la direction de Ronald Selbonne. Éditions Jasor
Wonal Selbonne qui a été parfois Journalistes (Radyo Tanbou, Newsmagazine, é Jakata..) a fait de ce livre une véritable enquête d’investigation. Il fait appel pour ce faire à des historiens (R. Belenus, L. Choucoutou, JP. Sainton), à un Pilote (Alain Andrea), à un sociologue (Franck Garain) et au politologue Julien Merion. Il s’agit donc pièces à conviction à l’appui, de décortiquer, de radioscoper la catastrophe aérienne, de juin 1962 qui a privé la Guadeloupe et la Guyane de 2 leaders autonomistes qui rentraient au pays pour continuer in situ leur combat politique et idéologique contre le système colonial français.
Le Boeing d’Air France qui a crashé à Deshaies ce 22 juin, a-t-il été “saboté” par les services secrets français, pour se débarrasser de 2 activistes autonomistes notoires ou s’agit-il d’un simple accident. Toutes les réponses sont dans cette belle enquête.
“Transculturation et perspectives féministes chez les amérindiennes kalinago et garifuna”. Jennifer Ithany Cognet. Edition L’Harmattan
L’ouvrage de Jennifer Ithany Cognet est assez surprenant car il aborde la question amérindienne sous un angle totalement inhabituel. En effet, l’autrice qui n’est pas archéologue mais docteure en langues étrangères a choisi d’explorer la question de la féminitude dans ces sociétés amérindiennes post-coloniales de la Dominique et de St Vincent.
Pour ce faire, L’autrice a d’abord fait une approche à la fois anthropologique et culturelle, pour tenter de nous faire une description assez précise de l’amerindianitude dans cette partie de la caraïbe où vivent encore des améridiens.
On s’aperçoit alors que le féminisme postcolonial caraïbéen, est très particulier. En résumé, un ouvrage d’une grande valeur sociologique et qui permet à mieux aborder la connaissance et les cultures de notre caraïbe. Un ouvrage documentaire.
“Vendémiaire : Colonie de la Guadeloupe – An X de la Révolution. Quand Delgrès dit « non au rétablissemnent de l’esclavage »”. Guy Lafages. Editions Neg Mawon. 145 pages.
Peronne n’a oublié que c’est ce même Guy Lafages, qui est l’auteur de “L’impossible procès”, (L’harmattan 2018). Ouvrage qui a permis la mise en scène par Luc St Eloy, d’une pièce qui est devenue pour une foule de raisons aussi célèbre que le sujet abordé : Le procès des patriotes Guadeloupéens d’après mai 67.
Cette fois G. Lafages a choisi une autre période de l’histoire de notre pays pour son “Vendémiaire”. Nous voilà donc projetés en octobre 1801 (la période vendémiaire selon le calendrier des révolutionnaires français de1789). Lacrosse, le fidèle de Napoléon est de retour en Guadeloupe, Ignace, Delgrès et les soldats de l’armée guadeloupéenne sont prêts pour l’affrontement face aux troupes esclavagistes de Bonaparte, dont le tristement célèbre Richepance. Pour la dramaturgie de la pièce, Lafages s’autorise quelques petits écarts avec l’histoire réelle… mais ce texte est surtout l’occasion de “voir” des personnages qui ont marqué cette époque, tels que : Marthe Rose (compagne de Delgrès, Noel Corbet Codou, Massoto…). Il faut maintenant attendre la mise en scène de cette pièce, pour “revivre” cette page de notre histoire nationale. A lire avant de voir de la pièce qui en sortira.
“La face cachée de la Politique en Ile-de-France”. Babette de Rozières. Orphie. 264 pages
Babette de Rozières est, on le sait une excellente cuisinière guadeloupéenne qui a fait son chemin en France. Elle a su tout mettre en œuvre pour hisser au premier plan de la gastronomie des dernières colonies française, et elle a grandement réussi ; Mais voilà que cette femme, qui s’est aussi lancée dans la politique du cité de la Droite parisienne, a décidé sur 264 pages de “cuisiner” comme il le faut l’une de ses ex-amies en politique : Valerie Precresse.
L’ouvrage d’un point vue des révélations sur tout le back office est un plat croustillant et appétissant. Et donc, la pauvre Pécresse, est après lecture du livre Babette complètement grillée, carbonisée. À déguster sans modération.
“Épopée Créole” de Gladys M. Francis. Histoires en Transgression.
Un livre d’une très grande diversité. En effet l’autrice doyenne des universités à La Howard University (USA) a fait un casting High Level pour son ouvrage. Pour bien marquer la Guadeloupéanitude qu’elle porte en elle, Gladys Francis a séquencé son livre en utilisant les 7 rythmes du ka qui sont à la fois des marqueurs identitaires mais aussi toute la portée sociologico-culturelle de son “épopée créole”. L’autrice explicite parfaitement sa démarche : « Épopée Créole » examine les complexes des relations qu’entretiennent les notions de citoyenneté, de mouvement et de de liberté avec les traumas de la “grande histoire coloniale”
Épopée créole est donc un essai qui passe en revue et de manière très critique : l’ethnicité, le genre, la sexualité, la classe et la religion. L’autrice a préféré ne pas s’aventurer sur la dimension purement politique et coloniale de son pays. On peut le regretter ; Qui sait si la vision que Lena Blou a du corps dans notre danse nationale n’aura pas aidé à mieux comprendre celle du péyi gwadloup, ki ka bigidi pa ka tonbé, men pa ka vansé asé adan chimen a kaskod !
Attention Gladys Francis est considérée comme on metfédam pour ses recherches aussi bien aux Etats Unis, en Europe, en Afrique que dans sa Guadeloupe Natale.
Épopée Créole sorti en 2022 fait suite à un précédent ouvrage “Amour sexe et trauma dans la caraïbe francophone” ( 2016 LHarmattan) qu’il faut aussi avoir lu.
“Le Chef d’œuvre” : Konplo a neg ! Edgar Ferus et Antoine Nabajoth. Kontakaz. 160 pages.
Encore une heureuse initiative. E. Ferus est un conteur qui a créé son “kontakaz”, et est devenu dans le domaine du Kont Gwadloup, une référence depuis près de 3 décennies.
Antoine Nabajoth, artiste peintre quant à lui, a créé un atelier d’art, qui est en quelque sorte à la fois un laboratoire et quasiment un musée pour ses œuvres. Les 2 artistes se connaissent depuis très longtemps et après des cheminements parallèles ont décidé de faire œuvre commune. Le résultat est un magnifique livre de contes peints et une expo qui démontre l’excellence de ces deux artistes. Le Chef d’œuvre comme son nom l’indique est un beau livre.
“Le Cyclisme, miroir et espoir des sociétés aux Antilles et en Guadeloupe”. Errol Nuissier. Sepia éditions. 160 pages.
Le cyclisme est de loin le sport maillot jaune en Guadeloupe. Chaque année, depuis les fifties, et donc la création du Tour de la Guadeloupe, ce sont des milliers de guadeloupéens, fans qui se rassemblent au bord des routes pour encourager leurs cyclistes. Au cours des années, des champions ont marqué par leurs prouesses l’histoire. Mais Errol Nuissier qui est psychologue donc observateur attentif de sa société, s’est demandé avec raison, ce que cette cyclistomanie pouvait révéler au-delà du challenge sportif. C’est le sujet de cet ouvrage qui explique parfaitement pourquoi, nous nous avons un vélo dans la tête.
“Un sens à la vie, malgré tout”. Clément Gédéon. Le lys bleu. 242 pages
Clément Thélème Gédéon que nous avions reçu en direct au mois d’octobre dernier au #ZCLNEWS nous avait longuement et avec quel enthousiasme, parlé de son enfance très rurale à Capesterre BE, de ses voyages de par le monde et de son expérience à la tête de la Banque Verte. Quelques temps après, à l’âge de 83 ans, il s’est éteint. J’en parle avec un peu d’émotion, car en quittant le plateau de l’émission, il m’avait annoncé avoir commencé la rédaction d’un second ouvrage que nous ne lirons jamais. Son 1er et unique livre est davantage un récit de vie qu’une simple biographie ; car au-delà de son histoire personnelle entre les lignes. C’est aussi une photographie ou une manière de témoigner d’une Guadeloupe que nous ne connaissons plus.
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