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Guadeloupe. Médias : FA, vie et survies d’un journal colonial en pays colonisé.

Guadeloupe. Médias : FA, vie et survies d’un journal colonial en pays colonisé.

 Pointe à Pitre. Jeudi 26 septembre 2019. CCN. C’était le 24 janvier dernier, France Antilles devenu FA célébrait en grande pompe son nouveau-nouveau départ. Après des mois d’incertitudes, de négociations, de crispations, la crise débutée en mai juin 2017, semblait avoir trouvé un début de solution. Le groupe AJR Participation avait réussi à convaincre le tribunal de commerce, et même la société des journalistes de FA de la crédibilité d’un plan de continuation, mis en œuvre par une nièce de Robert Hersant : Aude-Jacques Ruettard. De leur côté les syndicalistes de l’UGTG restaient eux en mode véyatif. En l’espace de quelques mois, on s’aperçoit qu’Ils n’ont pas eu totalement tort car la crise est de nouveau à la une d ‘un quotidien qui tente de survivre.

Focus sur l’unique quotidien Antillo- Guyanais, qui a été à sa création (1964) l’un des supports idéologiques et médiatiques du système colonial français. Question avec l’arrivée du numérique et surtout la perte d’influence de la presse papier, le pouvoir a-t-il toujours autant besoin de FA pour affirmer sa présence ?

1 Pub+ diffusion : un modèle économique dépassé

Ce qui dans le passé a fait le succés commercial de FA, c’est autant la vente au numéro, que la pub qui permettait au journal d’être une très bonne affaire pour le groupe Hersant. En effet pendant des années, France Antilles, de par sa position monopolistique (quotidien unique sur le marché), pouvait « tranquillement » se gaver avec la pub. Aujourd’hui, la situation a totalement changé. Le journal a perdu une grande partie de sa force de vente car son lectorat s’est raréfié. Jusqu’au début des années 90, le week-end FA et son supplément télé TV Mag diffusaient jusqu’à 40.000 ex chiffre tombé à 10.000 ex depuis les crises successives.

Les pertes dans secteur publicitaire « plombent » le maintien à l’équilibre. Le Chiffre d’affaire pub est en régulière régression depuis ces dernières années du fait de la concurrence (particulièrement l’affichage en panneau 4X3), la baisse des tarifs du marché et certainement d’un « endormissement  » de la régie de FA. Dans la grande majorité des journaux basés sur un modèle économique Pub+diffusion, la Pub doit être bien au- dessus du CA de la Diffusion. C’est de moins en moins le cas à FA.

En fait il s’avère comme indispensable qu’une réflexion s’impose sur la rentrée du chiffre d’affaires et donc la commercialisation du journal

2. Mauvais choix techniques et erreurs stratégiques

Lors du lancement officiel de la nouvelle formule, la direction avait beaucoup insisté pour présenter les « nouvelles » rotatives qui se devaient d’être LE point fort du nouveau FA. Visiblement cet ‘équipement industriel n’a pas eu le rendement espéré car ces rotatives de mauvaise qualité trop onéreuses en maintenance et mal dimensionnées par rapport au tirage n’ont pas contribué à améliorer la qualité technique du journal (photos et impression) qui demeure très médiocre.

3/ Une ligne éditoriale de proximité qui ne fonctionne plus

Le » succés » du FA des années de gloire, était en grande partie basée sur un traitement parfois « sensationnaliste » d’infos de proximité : les faits divers de toutes sortes faisaient très (trop) souvent la une du Quotidien et de notre quotidien flattant un lectorat toujours friand de ce type d’infos. Mais les temps ont changé, et FA a dû aussi modifier son offre éditoriale car son lectorat vieillissant ne s’est pas beaucoup renouvelé. Est-ce vraiment un hasard si récemment, le groupe FA a lancé « Seniors » un magazine papier glacé dont la cible et le titre sont éponymes…. Quoi qu’on dise, l’irruption du net et des réseaux sociaux a porté un coup à la diffusion exclusive dans la presse papier, des faits divers (accidents, meurtres, assassinats, braquages). Et même si la fiabilité des infos des réseaux n’est pas toujours garantie,du seul fait de l’immédiateté et la gratuité le journal qui en faisait son fonds de commerce a bien été obligé de revoir sa copie, et en conséquence le lecteur qui l’achetait essentiellement pour cela.

4/ Les repreneurs : des requins ?

Comme à chacune des crises, dès que le tribunal de commerce lance le signal de départ les requins- repreneurs sortent des profondeurs des abysses médiatiques et montrent leurs dents aiguisées. Et comme à chaque fois les offres ne satisfont pas le personnel, ni le l’administrateur judiciaire Selon nos informations le personnel est loin d’être satisfait des offres faites.. Les rédactions de FA Guadeloupe et Martinique, n’entendent pas se laisser absorber par des entrepreneurs aux dents longues voulant se servir de la presse pour d’autres ambitions ou pire qui sont porteurs d’idéologies peu démocratiques.

5/ France Antilles avec ou sans la classe politique ?

Curieusement la survie ou la mort éventuelle du journal qui a souvent été au service de la classe politique ne suscite jusqu’à maintenant chez eux la moindre réaction.

Visiblement les politiques, comme à leur habitude ne vont pas beaucoup bouger et vont jouer les pleureuses à la fin. Le plus souvent, les hommes politiques préfèrent se taire pour ne pas être accusés d’aider une entreprise privée. Ils vont jouer la musique habituelle : « Nous sommes tristes pour le pays mais nous sommes impuissants…»

De son côté le pouvoir colonial qui a été des décennies durant au plan économique, le garant de la survie de FA, qui était avec la radio officielle, le media du pouvoir, semble être sur le point de « lâcher » FA.

A sa création FA a été on le sait le support d’un système, est-ce parce qu’il l’est moins que l’état s’implique peu ? On est loin de ce temps où l’État s’appuyait sur FA pour marquer sa présence et sa politique d’assimilation. Aujourd’hui, les autres grands médias radios télés assurent davantage et avec moins de réticences, les relais de ces informations « officielles » que FA.

Le FA de 2019 intéresse-t-il toujours le pouvoir colonial ? rien ne laisse le penser.

Le fwans manti des années 70, pour aider la Droite réactionnaire,qui titrait à la une avant chaque élection : autonomie = zasiet vid» n’est plus du tout le journal que souhaitait le pouvoir. Au fil des années, au niveau politique,la ligne éditoriale a été revue.. et même corrigée

6/ Le Digital a t-il tué FA ?

Paradoxalement, à l’ère de la communication digitale, le journal papier pourrait encore avoir une ( petite) place dans nos pays. Pourquoi parce que nos populations sont vieillissantes et le tout numérique n’est pas encore une vraie réalité . Dans une récente étude (2017) l’INSEE révèle que plus de la moitié des Martiniquais et des Guadeloupéens de plus de 55 ans n’ont jamais touché à un ordinateur.

Et c’est ce lectorat de 50 ans et plus, victime de la fracture numérique et cœur de de cible qui se devait d’ acheter FA.

La question qui se pose est de savoir pourquoi les seniors, les lecteurs potentiels et réels du FA ont-ils ainsi abandonné leur journal ?

L’offre rédactionnelle est-elle toujours en phase avec les « besoins » de ces « clients ?

il faut cependant rappeler que les médias traditionnels ( Radios et Télé) se sont passablement développés et tout en servant souvent de FA comme source principale pour leurs « papiers » les journalistes privent le journal d’une frange importante de lecteurs car dés 7 h le matin, avec RCI ou Radio Guadeloupe, les lecteurs/auditeurs savent ce qui fait l’actu….

7/ la survie mais à quel prix ?

ll devient donc urgent pour la survie du FA de repenser son modèle économique en réduisant au maximum les coûts de production. Cela ne peut se faire sans une réduction drastique des effectifs. Et c’est là tout le nœud du problème.. Le groupe FA emploie sur les trois pays, près de 267 personnes.

Tout le monde le sait, mais personne ne le dit à haute voix, dans le contexte économique actuel c’est beaucoup trop. Depuis les dernières crises plusieurs journalistes sont partis soit en rupture conventionnelle, soit à la retraite mais la barque reste encore très chargée. A la fin du mois d’octobre, si aucune solution n’est trouvée si les repreneurs campent sur leurs positions. AJR qui propose un « plan de continuation » reste la moins pire des solutions. Mais à quel prix ?

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