Le drapeau Rouge-Vert-Noir symbolise la lutte de notre peuple
Fort de France. Jeudi 24 novembre 2022. CCN. Francis Carole, avant d’être l’un des fondateurs du PALIMA* a été pendant de longues années militant du CNCP*. Membre du Conseil exécutif, au cours de cet ITW-CCN, il nous fait part de son analyse de la situation politique de la Martinique sous la mandature de S. Letchimy
Francis Carole (FC).Pour l’heure et pour l’essentiel, cette équipe n’a fait que reprendre les projets entamés ou programmés par Alfred Marie-Jeanne : route de Sainte-Marie ou, plus emblématique, le lycée Schoelcher. D’autres travaux, pourtant d’un intérêt stratégique -comme le campus universitaire de santé- sont à l’arrêt. L’organigramme a du mal à se mettre en place et de nombreuses voix s’élèvent, dans la population, pour dénoncer, une CTM à l’arrêt. Un vrai mécontentement se fait ressentir quant aux délais de traitement des dossiers de toutes natures. Quant aux 250 projets promis, sans tenir compte de la réalité des moyens financiers de la collectivité, on reste dans l’attente du début de leur mise en œuvre. Évidemment, la communication fonctionne à plein régime. Elle ne suffit cependant pas à rassurer.
CCN. Vu de la Guadeloupe, on a le sentiment que le mouvement patriotique martiniquais est devenu silencieux..est ce à cause de la perte du leadership d’Alfred Marie Jeanne (AMJ) et des déboires au sein du MIM ? la question de la succession d’AMJ est posée?
Le mouvement patriotique martiniquais, dans sa diversité, est loin d’être silencieux. Le GRAN Sanblé Pou Matinik a connu deux échecs électoraux dont il doit tirer le bilan et qu’il doit digérer. La perte de la CTM, à quelques trois mille voix près, constitue une relative déconvenue. Pour autant les élu.e.s du GSPM poursuivent leur travail. Le lancement du congrès des élu.e.s a pu créer des désaccords au sein de cette alliance. Ceux-ci restent néanmoins extrêmement marginaux et ne sont pas de nature à peser sur l’avenir. Pour notre part, au PALIMA, nous considérons qu’entre les allégeances faciles et ce qui pourrait apparaître comme des polémiques, ily a place pour une analyse critique de la mise en œuvre des travaux du congrès et un débat démocratique -mais sans concessions- sur les choix du futur de notre pays. Certes, Alfred Marie-Jeanne, dirigeant du MIM, a profondément marqué un demi-siècle de l’histoire politique de la Martinique. Avec le temps, il apparaîtra sans doute comme l’homme politique le plus important que la Martinique ait jamais connu. Une autre génération est en train de prendre la relève. C’est la loi de la vie. Le MIM devra répondre à ce défi pour ce qui le concerne. Quant à la question de savoir qui, dans le cœur et l’esprit des Martiniquais.es incarnera le leadership du mouvement national, pris globalement, c’est l’histoire qui en décidera…
CCN. Serge Letchimy a relancé la question du drapeau national martiniquais, qu’on croyait réglé sous la mandature de AMJ, comment les patriotes ( ou le PALIMA) réagissent- ils à cette problématique ?
FC. L’ensemble du GRAN Sanblé s’est abstenu ou n’a pas pris part à ce vote de l’Assemblée de Martinique sur « l’appel à projet pour l’adoption d’un drapeau et d’une hymne de la Martinique ». Il est évident que le PPM est dans une stratégie d’instrumentalisation du drapeau.
Au PALIMA nous considérons qu’historiquement le choix d’un drapeau par un peuple a toujours été le résultat d’un rapport de force politique ou/et militaire. Cet acte, engagé souvent dans des situations exceptionnelles de lutte, marque l’engagement d’une communauté qui décide, solidairement, de marquer sa présence au monde et d’assumer un destin commun.
Le règlement voté par la majorité des élu.e.s sur le drapeau reste confus. On y parle tantôt de « l’adoption du drapeau de la Martinique, constitutif des emblèmes régionaux », tantôt de « sentiment d’appartenance nationale ».
Il est clair pour nous que le drapeau Rouge-Vert-Noir est un drapeau national symbolisant la lutte du peuple martiniquais pour son émancipation nationale. Ce n’est pas un des « emblèmes régionaux » s’inscrivant dans le cadre de la nation française. Certes, de fait, il est utilisé de plus en plus par toux ceux qui veulent signifier leur appartenance au peuple martiniquais. C’est manifestement un progrès. Néanmoins son sens ne doit pas être dévoyé.Nous avons beaucoup de réserves sur la transparence de cet appel à projet. Nous pensons qu’il serait plus transparent et politiquement responsable de faire voter le drapeau Rouge-Vert-Noir en Assemblée plénière de la CTM puis au congrès des élus. On pourrait aussi, dans un second temps, envisager une consultation de la population.
En effet, nous ne partons pas du néant. Il y a un drapeau qui, depuis plus d’un demi-siècle, a scandé la lutte de notre peuple pour son émancipation.Il est utile de préciser, pour être complet sur le sujet, que toutes les organisations patriotiques n’ont pas, à ce jour, adopté le drapeau Rouge-Vert-Noir. Le PALIMA l’a officiellement adopté lors de son second congrès de 2007. Lors de son quatrième congrès, en 2022, il a confirmé ce choix, tout en insistant sur l’urgence de mieux mettre en évidence les valeurs portées par le RVN.
CCN. D’une manière générale, est ce que la nouvelle représentation parlementaire martiniquaise ( Toutes tendances confondues) est à votre avis en phase avec les besoins et aspirations du peuple martiniquais?
FC. Pour l’heure, leur efficience n’est pas démontrée…
CCN. Après plus de 12 ans d’existence le site” Montray Kreyol” a disparu du Net, suite à une décision de justice (affaire Ceregmia). Raphaël Confiant, affirme que les “patriotes ne l’ont pas soutenu” alors qu’il était très engagé dans le ” Gran Sanblé”…
FC. La vérité nous commande de dire que le site « Montray Kreyol » a joué un rôle central dans notre victoire en 2015 et qu’il a, tout au long de la mandature du Gran Sanblé, maintenu son engagement. Au-delà de cet engagement, il a participé à la prise de conscience des Martiniquais et à toutes les luttes pour la promotion de notre langue et la dignité. Il faut aussi reconnaître que Raphaël Confiant a raison quand il affirme que Montray Kreyol n’a pas été suffisamment soutenu. Sans doute les difficultés rencontrées par le Gran Sanblé, l’éclatement de l’alliance, la campagne pour le renouvellement de la CTM peuvent-sans le justifier-contribuer à expliquer cette situation. Je pense que c’est une erreur. Il faut appeler un chat un chat.