L’histoire est ce long fil sur lequel, nous citoyens, inscrivons individuellement et collectivement, nos efforts pour une histoire commune, un «vivre ensemble ».
Beaucoup d’êtres humains ont souffert, sous la tyrannie, la barbarie, et subi des discriminations de toutes natures. Henry Sidambarom était l’un de ceux-là ; lui qui, de 1904 à 1923 s’est battu contre des discriminations, pour l’acquisition des « droits politiques et le droit au service militaire » des engagés indiens et leurs fils mais aussi pour permettre à de nouveaux libres d’être inscrits sur les listes électorales. Juge de paix, il s’est battu pour les plus humbles, pour son pays, la Guadeloupe. Les conséquences de ses actions ont dépassé les frontières du péyi Gwdaloup pour trouver écho notamment en Martinique et à la Réunion.
D’autres encore, plus récemment, comme Mme Taubira-Delannon, députée de Guyane à l’Assemblée Nationale de France, le 21 mai 2001, ont permis la reconnaissance de l’esclavage comme crime contre l’humanité.
Nos efforts ne sont pas vains, mais le chemin est long et rude….
19 ans après ce vote historique en France, le vendredi 19 juin 2020, le Parlement Européen par une résolution adoptée à la majorité de 493 voix sur 664 présents, 104 voix contre et 67 abstentions, déclare que « la traite des esclaves est un crime contre l’humanité ».
Une guadeloupéenne, eurodéputée, Mme Maxette Pirbakas, représentante du Rassemblement National et membre du groupe Identité et Démocratie regroupant des députés de droite et d’extrême droite a, selon ses dires, tantôt voté contre, tantôt s’est abstenue.
Qu’importe le vote ! Ce qu’il convient de constater, c’est qu’elle n’a pas voté en faveur de la résolution. Et tout comme l’ensemble des guadeloupéens, nous sommes indignés ! C’est une véritable insulte aux Guadeloupéens, à tous les Guadeloupéens, directement issus de l’esclavage ou non. C’est une insulte à l’Humanité !
Qu’elle ait été présente ou pas ou que ce soit son président de groupe qui a procédé au vote mais c’est en son nom que le vote a été enregistré. L’appartenance politique de Mme Pirbakas préfigure tous ses votes, d’aujourd’hui et de demain.
Ne pas voter en faveur de l’initiative de Younous Omarjee, revient à nier l’Histoire notamment celle de la Guadeloupe ; l’Histoire des peuples arrachés, des peuples déracinés, des peuples transplantés !
Nous avons donc les députés européens choisis pour nous ! Ce n’est plus le suffrage universel qui décide ! Les vrais responsables sont les partis politiques traditionnels de droite, du centre et de gauche qui n’ont permis à aucunguadeloupéen d’être en position éligible.
Ce qui nous dérange et nous offusque, c’est ce double déferlement contre les guadeloupéens et contre les guadeloupéens d’origine indienne.
Pour rappel, si les personnes d’origine indienne se disent guadeloupéens, pour de trop nombreux autres compatriotes y compris les médias, ces personnes font parties de la « communauté indienne » et non du peuple guadeloupéen … mais jusque-là c’est tolérable, car des communautés, il y en a partout et pas forcément celles axées sur les origines.
Mais, en tant que guadeloupéens d’origine indienne, nous sommes tout aussi indignés par la malhonnêteté de certains de nos compatriotes, voulant laisser entendre que tous les « indo-descendants » guadeloupéens partageraient les idées et positions de Mme PIRBAKAS, parce que ne se sentant pas concernés par l’esclavage. Tous les guadeloupéens ne sont pas d’extrême droite et donc, il en est de même pour les personnes d’origine indienne.
Cette confusion avait déjà été entretenue à l’annonce de la présence de cette personne sur la liste FN/RN aux élections européennes, oubliant que les pionniers de l’implantation du FN en Guadeloupe étaient des guadeloupéens « afro-descendants ». A ce moment-là, personne, et avec raison, ne s’était permis de dire que tous les nèg Gwadloup étaient des FN !
L’amalgame doit être stoppé. Et il faut donc considérer Mme PIRBAKAS comme une élue de France issue d’un parti politique d’extrême droite de France !
Nous nous devons de rester dans le droit fil du combat initié par Henry SIDAMBAROM et d’autres guadeloupéens.
Nous, Guadeloupéens, ne nous exprimons pas en tant que personnes d’origine indienne, mais en tant qu’êtres humains. L’histoire de l’engagisme fait suite à celle de l’esclavage. Cette histoire commune a comme responsable la colonisation et la société de plantation pour la production de richesses. Eric Williams a dit, dans son ouvrage « Capitalisme et esclavage » : « Mais l’abolition de l’esclavage ne signifiait pas la suppression des plantations sucrières. L’émancipation des Noirs et l’inadaptation de l’ouvrier blanc relancèrent le planteur dans la situation qui était la sienne au 17ème siècle, comme alors il avait besoin de main d’œuvre. Il était auparavant passé de l’Indien au Blanc, puis au Noir. Maintenant privé de Noir, il s’était à nouveau tourné vers le Blanc, puis vers l’Indien, cette fois-ci, l’Indien de l’Inde… ».
Nous nous élevons donc énergiquement contre ce déni de l’histoire, et nous nous battrons pour éviter tout amalgame qui pourrait être fait à l’encontre de la Guadeloupe et de son peuple.
Une fois de plus, nous mettons en garde tous ceux qui veulent semer la division au sein du peuple Guadeloupéen.
Nous devons poursuivre ensemble la construction de notre pays, du péyi Gwadloup, ne l’oublions jamais ! Ensemble, nous sommes plus forts !
Frantz GOBALY (Association Saravanam)
Olivier MOUNSAMY
Elie SHITALOU (Sanatan Dharma Samaj)
Cheddi SIDAMBAROM
Eliézère SITCHARN
Comité du Premier Jour