Paris. Dimanche 20 mars 2022. CCN Ce soir-là, le 3 février, le New Morning, salle parisienne bien connue, a joué à guichets fermés. Malgré un froid glacial, une grande partie des amis de la communauté Afro-caribéenne avait fait le déplacement pour assister au premier vrai concert du Big’In Jazz Collective. Déborah Vey était là pour CCN : reportage.
Qu’est-ce donc que ce Big’In Jazz Collective ? (BJC) comment ce groupe fort sympathique s’est-il formé ?
En août 2020, alors que la Covid met à mal tous les festivals de France et de Navarre, Thomas Boutant (fils de Christian Boutant fondateur du Big In Jazz Festival en Martinique) et son cousin Manuel Boutant, décident de créer le Big In Jazz collective, à défaut de pouvoir organiser la 19ème édition du festival.
Ils font appel à 8 talentueux musiciens au palmarès international, d’origine martiniquaise, guadeloupéenne et haïtienne, pour une résidence d’artistes.
Ralph LAVITAL et Yann Négrit à la guitare, Maher Beauroy aux claviers, Sonny Troupé et Tilo Bertholoà la batterie, Stéphane Castry à la basse , Ludovic Louis à la trompette et Jowee Omicil au saxophone.
Ces têtes d’affiche ont par le passé, pour plusieurs d’entre elles, fait briller la scène du Big In Jazz Festival.
Au cours de cette résidence martiniquaise qui les réunira, ils auront la charge de revisiter et réécrire sept titres célèbres de la biguine et un titre international, mais aussi de composer une œuvre originale.
La restitution de ce fabuleux travail, s’est tenue le 30 août 2020 dans les Jardins de l’Appaloosa. Ce fut un vif succès ! Pari gagné ! Le public fut conquis.
Si la suite normale de cette performance aurait dû être la promotion sur différentes scènes de ce nouveau projet et concept, la pandémie en a déjoué les plans.
Mais Thomas et Manuel Boutant ne se laissent jamais abattre…
Comme ils l’avaient annoncé, le documentaire de cette résidence sortira et sera diffusé en avril 2021, puis en juillet 2021 c’est au tour de l’album « GLOBAL », enregistré en studio de voir le jour. Un petit bijou pour les afficionados !
Le groupe est invité sur les radios pour faire la promotion de l’album, et ils seront reçus en janvier 2022 à la salle PLEYEL à Paris , dans le cadre du You & the Night & The Music #18 soutenu par TSF Jazz, l’Adami et la Sacem.
L’ouverture progressive des salles de concert en France, permet d’envisager un avenir plus serein pour cet album. Enfin ! Le Big In Jazz Collective se produira pour son premier concert dans la salle mythique du New Morning le 3 février 2022.
Le public est prêt. Il attend ce moment-là avec impatience.
Les artistes entrent en scène sous les applaudissements … le concert démarre avec « Mi bel jouné » d’Al Lirvat, marqué par les drums de Sonny Troupé et Tilo Bertolo, rejoints par les cuivres de Ludovic Louis et Jowee Omicil. Le ton est donné !
S’en suit, « Serpent maigre de Stellio ». Puis, « La chandelle » d’Eugène Mona, interprété par Maher Beauroy et salué par le Ka de Sonny Troupé, entrainant ainsi le public dans les effluves d’un Léwoz.
La salle chauffe et chacun fait tomber manteaux, doudounes et autres tenues chaudes, oubliant le temps presque glacial qui sévit à l’extérieur… Le bassiste Stéphane Castry, tente de nous faire redescendre avec « Chilou » d’Alain Jean-Marie, afin de reprendre nos esprits. Puis surgit « Tomaline » de Marie-Josée Alie et du groupe Malavoi, dans une version un peu rock dans laquelle s’inscrit un beau solo du bassiste.
Arrive ensuite « Haïti » d’Alain Jean-Marie. Le saxophoniste Jowee Omicil qui au fur et à mesure des précédentes interprétations a quitté pull, écharpe, débardeur, arbore avec fierté son tee-shirt aux couleurs rouge et bleu du drapeau haïtien et floqué de son inscription. L’arrangement de ce titre est particulièrement explosif et inattendu quand on a en tête la version originale posée et retenue par le swing de la basse. La version de nos comparses est rythmée et saccadée, mettant en exergue le côté tumultueux et l’incompréhension collective des évènements successifs et difficiles que vit et subit cette nation depuis trop longtemps. La salle est en liesse !
Puis vient le titre éponyme de l’album, « Global » composition originale du groupe posée sur une rythmique reggae un peu déjantée, laissant ressortir harmonieusement la sensibilité artistique de chacun. Yann Négrit s’en donne à cœur joie. Les corps se balancent dans la salle, bien que vissés aux sièges du New Morning comme l’exige la situation sanitaire. Comme dirait Ralph Lavital « C’est compliqué ! ».
Et comme si la situation n’était pas suffisamment compliquée, ces messieurs enchainent avec « Come together » des Beatles. Une version où rock et influences caribéennes font bon ménage, et à laquelle sans aucun doute, Paul McCartney ne saurait résister. La salle est déjà en transe quand ils poursuivent avec l’hommage rendu à Jacob Desvarieux.
Le concert s’achèvera sur « Concerto pour la fleur et l’oiseau » de Marius Cultier. Le touché de Ralph Lavital à la guitare particulièrement présent sur ce titre, nous émeut et nous invite au rêve.
Un big-up à cette belle et humble équipe qui nous a régalé pendant près de deux heures de spectacle. Dans l’intimité du New Morning, il est aisé de ressentir ce qui transpire à travers ces merveilleux artistes musiciens : simplicité, professionnalisme, passion et amour de la musique.
Si vous ne les connaissez toujours pas, n’hésitez pas à vous procurer leur album « GLOBAL ». Des bruits de couloirs prétendent qu’ils seront très prochainement sur la scène de Jazz à Vienne. Si vous passez par-là, faites le détour, vous ne serez pas déçus?.
Déborah Vey
Crédit photos @Daniel Baud.