Baie-Mahault. Lundi 4 novembre 2019. CCN. C’était durant ce week-end, la 3ème édition du colloque international « Sciences Afrique Noire & Modernité » à la maison coloniale de Wonche. Encore une fois, la ville de Baie-Mahault met la culture à l’honneur avec un colloque qui a duré trois jours. Objectif : mettre en exergue l’excellence de l’Afrique noire dans le monde scientifique. De prestigieux conférenciers et érudits d’Afrique ont partagé leur savoir avec le grand public afin d’éveiller les consciences et de déconstruire certains… mythes et théories. Et si on nous avait menti et occulté la vraie puissance créatrice innovatrice de l’Afrique ?
Savions -nous que le premier ordinateur du monde était africain ? Savions -nous que les mathématiques avaient été inventés par les africains ou encore que la première créatrice de jeux vidéos était une femme noire ?
Cette année ,la ville de Baie-Mahault a jugé important de montrer que l’Afrique rime aussi avec mathématiques et qu’il était primmordial de connaître cette partie de l’histoire. Dans une politique de démocratisation de la culture, afin de la rendre accessible à tous, ce colloque grand public « répond a un fort besoin de mettre la connaissance au centre de l’éducation en permettant à tout un chacun d’avoir accès au savoir » selon Mme Hélène Polifonte, maire de Baie-Maharult.
Cette manifestation tenue par l’institut Anyjart en partenariat avec la ville de Baie-Mahault avait pour invité d’honneur le Professeur Théophile Obenga grand savant et historien congolais qui nous a fait l’honneur de partager le fruit de ses recherches. D’autres invités prestigieux étaient également au programme . Parmi eux on peut citer Murielle Tramis, pionnière française du jeu vidéo, N.Kalala Omotunde fondateur de l’institut Anyjart, Pascal Adjamagbo docteur d’Etat en Mathématiques… ainsi qu’une pléiade d’autres invités.
Sous forme de « talkshow » diffusé en direct en Afrique et aux Antilles, dans une sorte de petit salon aménagé, les intervenants ont animé des conférences et débats sous les thèmes de « L’origine africaine du système alphanumérique gréco-romain », « L’imagerie 3D et l’intelligence artificielle en Afrique », « De l’Afrique à l’ère spatiale. »….
Le discours d’ouverture du Professeur Obenga, applaudi et felicité par le public, a permis à petits et grands de comprendre la portée réelle de cette manifastation.
Malgré la fatigue liée au voyage et à sa mobilité quelque peu réduite, le professeur a tenu à être debout face à l’estrade afin de raconter son histoire, enfin… notre histoire. S’appuyant sur les théories de Platon à Aristote , il affirme, persiste et signe « L’Afrique est le berceau de la géométrie et des mathétiques et ne pas l’admettre c’est remettre en cause les plus grands écrits de l’histoire. Cela peut paraître très bête mais à l’origine,les africains sont ceux qui ont créé le papyrus. Sans l’Egypte il n’y aurait pas eu de mathématiques ni de Bible car le papyrus était le seul support d’écriture des premiers écrits. Il a permis de garder les héritages. A moins que l’Egypte ne soit en Europe… l’Afrique est le point de départ de l’histoire. » Selon lui, il y a méprise et c’est aussi par là que commencent les divergences d’opinion car beaucoup se demandent si « l’Egypte c’est vraiment l’Afrique noire ? ». A cette question il faut préciser qu’il ne faut pas confondre race et culture et que l’Occident nous a formaté à penser que les égyptiens n’étaient pas des africains et encore moins des « noirs ».
Le professeura a également souligné que les africains ont été les premiers à créer les jeux de calculs alors que l’on a toujours mis en avant les chiffres arabes qui sont arrivés bien plutard. Il déplore le fait que de grands penseurs et penseuses africains (aines) ont été totalement mis sous silence alors qu’ils ont apporté les plus grandes avancées scientifiques connues à ce jour.
Ces messages forts , couplés de témoignages poignants,s’adressaient particulièrement à la jeunesse qui à la surprise générale était également présente dans la salle. MurielleTramis, initiatrice du jeu vidéo Adibou et première française créatrice de jeu vidéo décorée de la Légion d’honneur, a voulu dédramatiser le jeu vidéo et encourager la jeunesse notemment les jeunes filles à ne pas se laisser impressioner. « Le jeu vidéeo est critiqué. On pense violence, addiction mais c’est un secteur passionant avec de belles opportunités de carrière qui malheureusement n’incluent pas assez les femmes (noires). Beaucoup de filles sont très fortes en maths mais par peur ne se lancent pas dans les voies scientifiques, beaucoup trop masculines à tord.»
Ainsi, avec un jargon qui s’est voulu « vulgarisé », le Professeur et les autres intervenants ont souhaité sensibiliser au mépris historique de l’Occident vis-à-vis de l’Afrique en invitant le public à éduquer la jeunesse à aimer et valoriser l’Afrique. « L’Occident a une haine viscérale de l’Africain. Ils connaissent les textes mais ne veulent rien savoir. Il faut bâtir une puissance politique africaine, c’est là que viendra le respect. Tout le monde est en Afrique sauf nous. Les chinois, les portugais ont compris sauf nous… ».
Cette manifestation prend tout son sens chez nous en Guadeloupe de part notre dualité identitaire en tant que « colonisés français , afro-descendants. ». Notre histoire et le regard que nous portons sur nous même est-lui aussi formaté par l’Occident Pour se forger une nouvelle opinion il suffit juste d’ouvrir les yeux, de s’informer à condition de bien vouloir entendre…
Jelenna Phébidias