Basse-Terre. Capitale. Mercredi 30 mars 2022. CCN. Du 11 au 19 mars 2022, l’Archipel Scène Nationale de Guadeloupe, a proposé plusieurs pièces de théâtre issues d’œuvres classiques d’auteurs et dramaturges de renom tels que Shakespeare, Racine ou encore Sophocle. Ainsi mardi 15 mars 2022, se jouait pour les scolaires, la première représentation d’Andromaque l’une des pièces mythiques de Racine, qui généralement s’étudie en classe de 1ère ou en Terminale. Au 21ème siècle, est-il encore possible de garder nos jeunes en alerte et éveillés, face à une pièce de théâtre dramatique déclamée en Alexandrin, quand le Rap et le Slam, sont à peu près les seules œuvres” poétiques » qu’ils écoutent en boucle ?
C’est là tout le travail d’adaptation et de mise en scène auquel s’attèlent Nelson-Raffaell Madel et Paul Nguyen depuis une dizaine d’années.
Nos deux comédiens n’ont pas froid aux yeux ! Si vous vous attendiez à un décor médiéval et pompeux d’ornements en tout genre, oubliez cela ! Quelques ustensiles d’entretien de la vie courante feront bien l’affaire, et quatre toiles de tissu soigneusement choisies et transformables à souhait, pour que les effets visuels nous plongent malgré tout à l’époque de la Grèce Antique. Tout est une question de mise en scène, de jeux de rôles, de lumière, sons et scénographie, et surtout une grande part de malléabilité du cerveau humain pour l’emmener là où il doit aller.
Nous nous laissons transporter …
Quelle audace et quelle ingéniosité !
Acte I – Mais au fait, où se déroule la pièce ? quelle est l’intrigue ? qui et pourquoi a-t-on tué Hector Roi de Troyes ?
De façon très humoristique et ludique, en prenant le soin de faire participer l’assistance, nos deux acteurs plantent le décor géopolitique de l’époque, dans cette partie du monde.
Il s’agit d’asseoir le contexte comme si les choses se passaient au 21ème siècle. Et ça marche ! Le public se prend au jeu.
En quelques minutes, et surtout si vous n’aviez jamais eu connaissance de cette pièce, vous saurez qui était Hector, qui est Andromaque, Astanyax, Phyrrus, Hermione, Oreste et ce qui lie tous ces personnages.
Oui, car ce qui vous aidera à la compréhension de cette pièce et qui vous tiendra en haleine jusqu’au déroulement final, c’est la tourmente amoureuse qui se joue sous vos yeux.
Oreste aime Hermione, qui aime Phyrrus, qui aime Andromaque, qui aime Hector qui est …mort !
En effet, dans l’acte II, on entre véritablement dans le vif du sujet… Quoi de plus sérieux que la politique, peut nous tenir en éveil ? L’amour bien sûr ! L’amour à sens unique, l’amour passion, l’amour fidèle, l’amour filiale, l’Amour tout court !
Oui, c’est dans une déclamation d’Alexandrin, qui a aucun moment ne bouscule la clarté des scènes et de l’histoire complexe à laquelle nous assistons, que nos deux comédiens endossent avec une maîtrise parfaite, un enchainement de rôles, en se glissant discrètement sous une toile que notre cerveau a désormais identifié comme étant avant tout le personnage.
Il faut saluer, la belle performance de ces artistes, drôles, vifs, dynamiques lâchant par-ci, par là quelques clins d’œil quand il le faut, mais sachant aussi très rapidement se replonger dans la dramaturgie de l’œuvre.
Ils ont su capter agilement leur public, ce qui n’était pas gagné sachant que c’était la première fois qu’il présentait ce projet devant des étudiants.
L’échange privilégié que Nelson Rafaell Madel et Paul Nguyen ont eu avec les étudiants en suivant, démontrait bien que ces derniers avaient été séduits.
Une autre représentation grand public était prévue le mercredi 16 mars à 19H. Il n’aurait pas été de trop qu’ils puissent se produire sur la Grande-Terre…
Déborah Vey
Crédit photo Jean Pierre Listoir