Grand Bourg. Dimanche 1 décembre 2019. CCN. Patrice Tirolien a vraiment été à l’antithèse de « Je communique donc je fais ». Bien au contraire, sa vie professionnelle et sa vie politique ont été marquées par le refrain « Je fais et j’ai la tête haute ». Même, la déclinaison de sa trajectoire au service de la cause publique s’illustre par une sorte de paradoxe autour de « l’effectivité du faire » et de « l’ignorance sur les faits de son action ».
Il y a les faits indéniables relatifs aux activités de proximité de tous les jours qui font la marque des maires aimés par leur population. Il s’est toujours retrouvé comme un poisson dans l’eau pour se rendre disponible à la rencontre des habitants. Il a sans cesse répondu présent pour prendre connaissance des tracas de ses administrés et apporter des réponses, qu’elles soient celles souhaitées ou au contraire celles qui déplaisent. Ayant eu l’occasion d’être le témoin de visites impromptues d’administrés à son domicile en plein repas dominical, constatant au passage qu’il concurrençait un peu la fonction du serviteur de la paroisse, j’ai pu comprendre combien la tâche du Maire n’était pas une sinécure.
Ces faits sont singulièrement les actes mettant en lumière vive les décisions prises par l’élu qui honore le statut d’Homme politique œuvrant pour l’intérêt collectif. Dans cette Guadeloupe de 2019 qui a eu moult échos sur les dérives dans la gestion de l’argent public, l’exemple de l’équipe municipale de Patrice Tirolien en 1989 est un cas d’école pour témoigner des bonnes pratiques de gestion et de responsabilité d’élus guadeloupéens. Durant les cinq années 1989-1994 de sa première mandature, les élus de Grand-Bourg ont renoncé à percevoir leurs indemnités de conseillers communaux et, à force de travail, en discrétion, ils ont réussi à restaurer un climat de croissance économique. Qui dit mieux ? Sans doute que l’histoire des faits économiques et sociaux de la Guadeloupe mérite une plus grande considération de notre part. Sans doute qu’elle peut nous permettre d’appréhender l’avenir en apprenant de nous-mêmes et en nous octroyant plus de confiance. Aussi, il est bienvenu de souligner que ce pays a fourni des Hommes et des Femmes politiques qui se sont distingués par la droiture, le dévouement et la quête du progrès de la cité, cela loin des caméras, cela au plus près des citoyens. Sans aucun doute, Patrice Tirolien en fait partie.
Ces faits sont des aboutissements d’initiatives menées sans relâche sur le terrain pour convaincre des Femmes et des Hommes de s’unir pour construire une ambition collective et promouvoir un rêve du Faire Ensemble en Guadeloupe. Aujourd’hui que le sigle EPCI est d’un usage de plus en plus courant au sein de l’archipel Guadeloupe, il faut se rappeler que le premier EPCI de l’histoire de l’Outre-mer est la Communauté de Communes de Marie-Galante (CCMG) qui a vu le jour le 8 janvier 1994. Patrice Tirolien a déployé beaucoup d’énergie pour aboutir à sa création. François Paméole, Benoit Camboulin, Patrice Tirolien et Harry Selbonne ont formé ce quartet qui a interprété les symphonies du Pays Marie-Galante dans ses premières années.
Ces faits sont des Actes, Actes avec un A majuscule comme ce fut le cas pour le renoncement au cumul de mandat. Sans bruit, Patrice Tirolien a adopté ce principe en 1996, bien avant l’intensification des débats sur le non-cumul des mandats.
Ces faits sont les résultats de l’action de son équipe qui a permis à sa ville de se développer en contexte de ressources limitées, bornées par une multitude de contraintes dont celle majeure de la double insularité.
Les faits de l’action du maire consistent aussi à donner corps au théorème « Gouverner c’est prévoir ». Patrice Tirolien était probablement en avance sur le calendrier du temps marigalantais lorsqu’il proposa une diversification de l’offre touristique axée sur le haut de gamme et le tourisme golfique. N’est-ce pas que la Grande Galette donne à voir que le tourisme culturel est une option sérieuse et que la croissance de l’industrie touristique passe par l’enrichissement de l’offre ?
Hors de Marie-Galante, le corpus de l’action de Patrice Tirolien renvoie sans ambiguïté des constats de réalités bien tangibles et certainement éloignées des mythes que certains ont cherché à entretenir.
En se focalisant ainsi sur son activité de Député européen, membre du Groupe de l’Alliance Progressiste des Socialistes et Démocrates, il est surprenant de découvrir autant de traces rendant compte de son engagement inlassable sur une diversité de dossiers. Dans le cadre de ses missions quotidiennes, il a multiplié les rencontres des parties prenantes sur les grandes questions qui touchent aux régions ultramarines françaises, en s’impliquant physiquement et intellectuellement pour défendre les intérêts de Mayotte, la Réunion, la Guyane, la Martinique, Saint-Barthélémy, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon et la Guadeloupe qui forment la section Atlantique de la circonscription Outre-Mer comptabilisant environ 8 millions d’habitants en 2009.
En tant que Vice-président de la Délégation à l’Assemblée parlementaire paritaire ACP-UE (de septembre 2012 à juin 2014) et membre de la Délégation à la commission parlementaire Cariforum-UE (de juin 2010 à juin 2014), il a effectué divers déplacements à l’extérieur de l’Union européenne pour des négociations touchant aux relations avec des pays tiers. En tant que membre de la Commission du développement (de juillet 2009 à juin 2014), il a conduit et participé activement à de nombreux travaux et débats sur la politique économique de l’union européenne sous ses facettes multidimensionnelles, allant de la politique de cohésion, la politique fiscale, la politique des investissements, …, à la politique de sécurité et de défense commune.
On peut se restreindre à un seul exemple pour citer des illustrations significatives. Son intervention dans la débat sur la politique de la cohésion le 21 novembre 2013 à Strasbourg au parlement européen : « Monsieur le Président, après plus de deux longues années de négociations, nous votons enfin ce règlement sur la politique de cohésion. Deux années qui n’auront pas été inutiles, ne serait-ce que dans la possibilité qui nous a été offerte de limer les dents de cette affreuse conditionnalité macroéconomique. Un instrument qui demeure inique, injuste et surtout inefficace ». Il n’est pas vain d’indiquer ici que cette approche de la conditionnalité macroéconomique portée par un ensemble de députés européens exprimait le gel du versement des fonds européens aux régions d’un État membre qui n’était pas parvenu à respecter les règles de bonne gouvernance économique, en particulier la règle de déficit inscrite dans le Pacte de stabilité et de croissance.
Les retranscriptions audiovisuelles de ses interventions au parlement européen se dénombrent en plusieurs dizaines. En les visualisant et en ayant à l’esprit que ce type de prise de parole est la partie aval d’un cycle de travaux fastidieux en amont, de même en prenant le temps de se documenter sur ses contributions, l’évidence émerge sur « l’effectivité du faire » de Patrice Tirolien.
Il y a beaucoup de choses à dire et probablement que d’autres diront.
Gilbert Pincemail a été l’un des premiers de ceux-là et, dans son hommage empreint de sincérité, il a mis en lumière combien le parcours de Patrice Tirolien se conjugue avec les qualificatifs d’humilité, de bienveillance, de vertueux et de travailleur en silence.
En ayant pris part à la transformation de Grand-Bourg autour de Patrice Tirolien, Maryse Etzol propose depuis quelques années un souffle nouveau. Sa reconnaissance exprimée sans fard, teintée d’émotions profondes, représente l’illustration du nécessaire rassemblement pour bâtir la Guadeloupe à léguer à nos enfants.
Bien sûr qu’il manque des noms dans cet écrit…
Roland, les sept lettres Yannick me permettent de citer une dernière personne pour rappeler un acte rempli de symboles qui m’a marqué. Après avoir passé avec brio son parcours littéraire à l’Ecole normale pour s’engager dans une carrière de Professeure de philosophie, elle décida de tout arrêter pour se lancer dans des études de médecine. Toi, ayant déjà effectué ton retour au pays natal, accepta de l’accompagner à Paris et également sur les matières quantitatives, les mathématiques, statistiques et sciences physiques qu’elle n’avait pas en prérequis. A la deuxième tentative, elle a réussi à son concours à la Faculté de médecine Xavier Bichat à Paris. A son tour, pour t’accompagner sur ces derniers mois, elle a refait le chemin en sens inverse, quittant le Centre Hospitalier Universitaire de la Guadeloupe pour reprendre un poste de Médecin néphrologue qu’elle occupa au Centre Hospitalier de Sambre Avesnois à Maubeuge lorsque tu siégeais à Bruxelles.
Pour terminer ces quelques mots et mettre l’accent sur l’essentiel, il importe de répéter que Oui, Patrice Tirolien, Roland, a vraiment été à l’antithèse de « Je communique donc je fais » et, par-dessus tout, Il a fait, Il a beaucoup fait.
Alain Maurin