Chlordécone : rester vigilants et mobilisés
Francis Carole
MARTINIQUE
Vendredi 1er mars 2024
Pawol Lib (Libre Propos) est une nouvelle rubrique de CCN. Notre rédaction propose donc à tous les progressistes qui le souhaitent un espace de communication, une tribune dont le but principal est de porter une contribution au débat d’idées qui fait cruellement défaut dans notre pays. Les points de vue exprimés dans « Pawol Iib » n’engageront pas nécessairement la ligne éditoriale de CCN mais il nous semble indispensable que les intellectuels, la société civile aient la possibilité de pouvoir très librement opiner dans nos colonnes.
Ce 29 février 2024, l’Assemblée nationale française a voté, en première lecture, une proposition de loi « visant à reconnaître la responsabilité de l’État et à indemniser les victimes du chlordécone. »
Porté par le député guadeloupéen Elie CALIFER, ce texte a été adopté par 100 votes favorables. Il faut noter un vote défavorable et 80 abstentions (Républicains et majorité présidentielle macroniste)
L’article 1er de cette proposition de loi énonce :
« La République française reconnaît sa responsabilité dans les préjudices sanitaires, moraux, écologiques et économiques subis par les territoires de Guadeloupe et de Martinique et par leurs populations résultant de l’autorisation de mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques à base de chlordécone et de leur usage prolongé comme insecticide agricole. »
Le texte fait aussi état, entre autres objectifs, de « l’indemnisation de toutes les victimes », de la « dépollution des sols et des eaux », de la « mise en place d’un dépistage systématique du cancer de la prostate à partir de 45 ans pour les populations de Guadeloupe et de Martinique ». En outre, la République française « s’assigne pour objectif d’établir publiquement la responsabilité des décideurs politiques dans ce scandale d’État. »
Si cette proposition de loi constitue une avancée, elle reste cependant évasive sur la responsabilité de l’Etat français et des gros propriétaires fonciers dans l’empoisonnement des peuples martiniquais et guadeloupéen.
Elle ne désigne pas non plus tous les domaines qui devraient être concernés par les réparations (impact de la molécule sur les femmes et les nouveaux-nés, par exemple).
D’autre part, le processus parlementaire ne fait que commencer et l’on devra rester attentif au passage du texte au Sénat.
L’étape suivante -après amélioration et adoption définitive de cette loi-devra être une véritable loi programme fixant précisément les champs des indemnisations et des réparations, les moyens financiers et humains mis à disposition, le calendrier de mise en œuvre de l’ensemble des mesures retenues, l’organisation de l’évaluation de ces actions.
Les obstacles et les défis restent donc encore nombreux, d’autant que la « majorité » politique de l’Assemblée s’est contentée de s’abstenir lors du vote en première lecture de cette proposition de loi.
La mobilisation doit continuer jusqu’à ce que nous obtenions justice et réparation pour nos peuples.
NOU PA KA MOLI AN MAY !
Francis CAROLE