Elie Califer | Chlordécone : un non-lieu surprenant
Paris. Mardi 29 novembre 2022. CCN. Jeudi dernier, après seize années de procédure, le parquet de Paris a livré un signal inquiétant sur les suites judiciaires de l’affaire du chlordécone, estimant que les faits d’empoissonnement » ne peuvent recevoir la qualification légale d’empoisonnement » et que ceux-ci sont » en tout état de cause couverts par la prescription « . En effet, les magistrats ont demandé à ce que cette affaire se termine par un » non-lieu » ; ce qui, en d’aunes termes, signifie un abandon des poursuites contre l’Etat alors même que – ne l’oublions pas – ce dernier a été reconnu comme » premier responsable » par la commission d’enquête parlementaire de 2019.
La rigueur de droit est ce qu’elle est mais, convenons-en, la santé de nos concitoyens est dans cette affaire la plus précieuse des considérations à prendre en compte sinon la première
Cette demande de » non-lieu » a de quoi surprendre lorsqu’on sait que plus de 90% des populations martiniquaises et guadeloupéennes sont contaminées ; elle a également de quoi surprendre lorsqu’on sait que, alors interdite en 1990, le gouvernement avait accordé des dérogations d’usage aux producteurs bananiers des Antilles. Ceci est d’autant plus regrettable que les États-Unis d’Amérique avaient alerté en interdisant l’usage de la molécule sur Lerus propres terres en 1976 et qu’en 1979 l’OMS l’avait classé potentiellement cancérigène.
La réalité du drame sanitaire ne trompe pourtant pas : 40 000 hectares de terres sont pollués ; nos aliments, nos rivières et fonds marins sont chlordéconnés pour plusieurs siècles. Ce non-lieu ne fait que qu’aggraver le ressenti douloureux des femmes et des hommes contaminés par cette molécule.
Au-delà des plans chlordécone I, II, III et IV, cette décision vient ouvrir une plaie qui avait des difficulté à se cautériser. Nous devons ensemble poursuivre le combat pour faire la justice.