Voulant donner l’image d’un pays qui se reconnaît dans sa diversité et dans sa pluralité, l’Espagne a accepté que le Catalan, le Basque et le Galicien soient reconnus au même titre et au même niveau que l’Espagnol. En France, pays de tous les conservatismes et qui se présente soit disant, comme “pays des droits” de tous les Hommes, la question des langues régionales demeure encore un sujet hautement sensible, délicat, épineux parfois. La Corse, la Bretagne, le Pays Basque, l’Alsace et d’autres régions françaises en savent quelque chose.
Mais qu’en est-il de nos pays : Guadeloupe, Guyane et Martinique encore sous domination coloniale ?
Guadeloupe Guyane, Martinique, ces dernières colonies françaises et habilement façonnées par l’européanocentrisme, regorgent de grands esprits et notamment dans le domaine des sciences, des Arts, des Lettres et des langues qui font en sorte de bien valoriser nos spécificités. Parmi elles, notre langue nationale le créole a ses défenseurs et ses enseignants certifiés, agrégés et docteurs, ces fameux passeurs de langue, qui assurent la continuité de la vitalité de la langue.
Ki sé pou Gwadloup: Gérard Lauriette (Papa Yaya), Dany Bebel Gisler, Alain Rutil,Hector Poullet Sylviane Telchid, Benzo, Soni Rupaire, Guy et Marie Christine Hazaël Massieux, Catherine Pietrus, Ena Eluther, Mirna Bolus Jean Luc Divialle, Didier Manette é anlo anlo dot.
Pou Matinik : Jean Bernabé, Raphaël Confiant, Daniel Boukman, Jeannine Lafontaine, Lambert Félix Prudent , Monchoachi é on chay dot…
Pou Giyann : Georges Barthélemi, Alfred Parépou, Pierre Apollinaire Stephenson…
adan tout sé péyi ki anba jouk a fwansé, é dé mètamannyok é d metfédam, ki sav travay é fè nou vwè tout belté a lang an nou.!
Le fondateur des études et des recherches créoles à l’université des Antilles, feu le professeur Jean Bernabé, ce grand pionnier avait tellement œuvré pour que le créole soit porté haut et reconnu par les institutions françaises, et on voit aujourd’hui les nombreux fruits de ce travail collectif mené au sein du GEREC qu’il dirigeait : L’université des Antilles compte des étudiants diplômés du Master créole et du doctorat de créole. Il y a , et particulièrement en Guadeloupe, des lauréats du CAPES créole et parfois de l’agrégation de créole. La langue créole est enseignée dans des collèges les lycées et commence à l’être dans le premier cycle,
. Dans certains collèges de Guadeloupe, on ne propose parfois plus le latin en option, mais aux côtés de l’option anglais et espagnol, il y a notre langue nationale le créole. C’est dire que le travail des universitaires, des enseignants, des amoureux du créole paye progressivement. Il y a des dictionnaires et grammaires créoles . Il existe à l’Université des Antilles une revue scientifique dédiée à notre langue :Kréolistika qui est dirigée par Raphaël Confiant et dont le rédacteur en chef est Max Bélaise. Donc, c’est dire que notre langue créole s’est construite sa place au soleil des langues vivantes du monde.Fo nou kriyé on belWoulo bravo.!
Et si CCN tient à saluer le travail de tous ceux qui dans l’ombre ou dans la lumière ont œuvré pour cette affirmation et cette reconnaissance de notre langue (on pense aux éditeurs tels que Editions Nèg Mawon, Editions Nestor Editions Jasor, Caraibeditions et à tous les traducteurs de romans, de BD en créole),.
Cette langue qui auparavant n’était perçue que dans sa dimension orale, voit maintenant sa graphie, sa syntaxe, sa grammaire, ses expressions propres valorisées par écrit
Pourtant, une question se pose avec récurrence :quelle politique de développement de notre langue est mise en place ? que disent et font ceux qui sont dans les 2 Collectivités “majeures” de la Guadeloupe ?
Car pour arpenter la Caraïbe, et côtoyer nos voisins immédiats, faire du tourisme chez eux ou du business avec eux, il vaut mieux savoir parler une autre langue que le français et parfois c’est bien le créole qui nous permet de nous faire comprendre dans les autres pays de la Caraïbe:. A la Dominique, à Ste Lucie, en Haïti. Mais aussi à la Guyane, et encore dans certaines régions de Trinidad et Tobago
Et c’est parce que le créole peut être un outil – notamment économique – fort, que l’acte de marronnage et de résistance fièrement accompli en Martinique par le président de la CTM, Serge Letchimy, nous oblige à nous demander si au-delà du tradtionnel ‘mois du créole, du Conseil Général de Guadeloupe, il y aura une réflexion qui sera menée pour que notre langue continue à prendre de la dimension et à occuper la place qu’elle mérite.?
Alors bien sûr, il y aura toujours des gens pour répondre qu’il y a d’autres urgences et priorités à régler en Guadeloupe (comme le MACTe…) avant de songer à la place et à la valorisation de notre langue et de nos cultures … mais qu’est-ce que la langue sinon l’expression première de notre identité et de notre singularité ?
La question des langues régionales est encore sensible en France. Les Corses, les Bretons, les Basques et tant d’autres qui se battent pour conserver les particularités de leur région, se sentent concernés par cette question.
Le niveau d’asservissement culturel aux valeurs et aux signes d’appartenance occidentaux infligé aujourd’hui aux Antilles, et qu’on appelle communément aliénation, pousse à penser que la reconnaissance de notre langue semble secondaire parce que le créole vit déjà en nous depuis les débuts de la colonisation , a su résister et ce grâce à aux luttes soicales politiques et , culturelles sociales du courant nationaliste et patriotique guadeloupeen.
. Après tout, c’est bien notre langue qui nous a permis de pouvoir discuter entre nèg, zendyen, et européens à l’époque où nos ancêtres (pas les Gaulois !) se retrouvaient contraints et forcés de communiquer dans l’Habitation-Plantation. Le créole porte donc en lui toutes les traces de la construction et des évolutions de nos sociétés C’est cette langue native, qui nous permet de signaler qui nous sommes. Nou sé moun Gwadloup.!
Le rapport de force n’est pas,et n’est toujours pas, aujourd’hui, en faveur des descendants d’esclaves et des descendants de la main d’œuvre exploitée. Certains voudraient le changer. Il y a des rebelles en sommeil ou en éveil. Car, hormis ses besoins élémentaires, qu’est-ce qui est plus important pour l’Homme que sa dignité, que son identité, qu’un minimum de contour de sa personnalité ?
Si nou pa doubout, comment exiger le respect et ce qui va avec ? C’est-à-dire des conditions de soins hospitaliers dignes pour tous et un hôpital à la hauteur des attentes de la population, c’est-à-dire de l’eau dans tous les robinets et des déchets dûment traités, c’est-à-dire une jeunesse qui se sente prise en compte dans les processus décisionnels, c’est-à-dire notre capacité à gérer nous-mêmes une crise ou une épidémie, c’est-à-dire l’affirmation de notre capacité à penser et agir par et pour nous-mêmes ?
Dans nos pays toujours colonisés, l’État français doit assumer les engagements pris notamment concernant des solutions en faveur de la sécurité des habitants, et toutes les autres compétences dites régaliennes. Men es yo ké kouté nou si nou pa ka rèprézanté ayen ? si nou pa sav montré sa ki richès an nou, sa ki fos an nou?
Si nou pa doubout, ki jan nou ké fè « Yo » respekté lang, mès é labitid an nou , idantité a pèp an nou, tou sa ki ka fè nou sé nou ? ki jan nou ké fè « yo » konpwann plis ki an chanté ou adan on manman grèv « Yo » pé pa fè sa yo vléavè nou adan péyi an nou ?
kidonk plis ki poblém a lang la, sé tout poblém a péyi la é a divini a y: sé zyé ki lach !konba dèyè poko mannyé !
Danik Zandwonis