Basse-Terre. Capitale. Mercredi 25 octobre 2019. CMA. Grande est ma satisfaction, en vous présentant ce rapport visant à formuler un avis sur le projet de loi de ratification de plusieurs ordonnances prévues par la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel (loi du 5 septembre 2018) ainsi que diverses mesures d’ordre social.
Parmi les ordonnances qui doivent être ratifiées pour avoir force de loi, il y a l’ordonnance n°2019-893 du 28 août 2019, qui a prévu des mesures d’adaptation en outre-merpour ce qui concerne l’apprentissage. J’y reviendrai pour un examen détaillé.
Le deuxième volet de ce projet de loi, parmi diverses mesures d’ordre social, procède à la création d’une catégorie d’établissement public auprès de chaque région d’outre-mer pour la mise en œuvre opérationnelle des missions qui lui sont confiées par la région en matière de formation professionnelle.
Ce texte devrait nous permettre de sortir d’une situation qui aurait pu déstabiliser notre opérateur en matière de formation et ses personnels.
Je voudrais rapidement vous rappeler quelques-uns de ces soubresauts liés historiquement aux difficultés des AFPA, à la suite de la décentralisation de la formation professionnelle et de l’extension du principe de l’application du droit de la concurrence au champ de la formation professionnelle par les institutions communautaires.
La précédente mandature a dû gérer la décision de liquidation de l’AFPA du 3 octobre 2007 avec un déficit de 14 millions d’euros. Il a été créé une autre association relevant de la loi de 1901 (CRFP), puis le conseil régional a demandé une habilitation législative en 2010 pour mettre en place un établissement public administratif en mars 2014.
La fusion-absorption CRFP-EPA a été réalisée en janvier 2015. Un syndicat de personnel a querellé le contrat du directeur de l’établissement public, en contestant le fait qu’il ne soit pas un contractuel de droit public. Le contentieux a prospéré et, la cour administrative de Bordeaux a jugé que l’habilitation législative ne permettait pas de recruter un directeur avec un contrat de droit privé et a requalifié l’ensemble des contrats des personnels en contrat de droit public, en juillet 2017.
L’Etat avait été amené à « essuyer à peu près les mêmes plâtres » en dotant l’AFPA au niveau national d’un statut d’établissement public industriel et commercial.
Le contentieux qui a été à l’origine de toutes les turbulences, n’aurait pas connu la même issue aujourd’hui, puisque l’article 16 de la loi du 6 août 2019 dite de transformation de la fonction publique qui modifie l’article 47 de la loi 84-53 du 26 janvier 1984 prévoit que :
Le directeur général d’un EPIC peut être un agent contractuel nommé avec un mandat d’une durée limitée et qui bénéficie d’un contrat d’une durée égale à la durée de son mandat.
Nous disposerons donc en ce sens pour le prochain directeur général de l’établissement public.
Ainsi que vous le savez, notre assemblée par délibération de novembre 2017 a initié la régularisation de la situation de Guadeloupe Formation.
La délibération prise à cet effet a été considérée comme irrégulière par le tribunal administratif, ce qui a plongé l’établissement et ses personnels dans une forme de brouillard juridique ;
Malgré tout, le personnel, son encadrement, son conseil d’administration n’ont pas baissé les bras.
J’en veux pour preuve qu’en 2018, les objectifs fixés à l’établissement étaient de :
• Répondre aux besoins exprimés sur le territoire tant par les usagers que par les entreprises et les branches professionnelles
• Sécuriser l’employabilité des stagiaires en élevant leur niveau de compétences ;
• Positionner la collectivité régionale sur tous les champs qui seront impactés par les réformes à venir.
A ce titre, cet établissement a enregistré 2185 entrées en formation dont 460 stagiaires accompagnés dans le cadre de la formation continue.
En 2019, avec une offre de plus de 100 formations, dans le cadre de parcours pré-qualifiants, de parcours qualifiant et de parcours compétences, Guadeloupe Formation se donne les moyens de diversifier son offre de services.
La complémentarité est assurée par des actions, axées sur l’acquisition ou le renforcement des compétences, et ne s’enferme pas dans un modèle unique de formation.
Je vous avouerai, que fortement imprégné de cette motivation du personnel et de l’importance des enjeux dans ce domaine essentiel pour lutter contre le chômage, je n’ai pas ménagé ma peine pour obtenir le texte sur lequel notre avis est sollicité.
Après des péripéties diverses sur lesquelles je ne m’étendrai pas, mais toujours avec l’appui de la Ministre du travail, Madame Muriel Penicaud, et du Premier Ministre qui m’avait assuré par écrit de son soutien sur cette affaire, nous avons enfin un texte qui nous autorise à créer par délibération l’établissement public industriel et commercial, (EPIC) et ce après le vote et la promulgation de ce projet de loi.
Mais, le texte qui vous est soumis n’a pas vocation à répondre uniquement à la situation actuelle, mais à préparer Guadeloupe Formation aux défis des dix prochaines années.
Il a été, examiné minutieusement par le secrétaire général du gouvernement et le délégué général à l’emploi.
En dépit de sa concision, il contient un certain nombre de subtilités. La création d’un établissement public spécifique à la Guadeloupe par la loi contreviendrait au principe de libre administration des collectivités locales.
Il est donc opté pour la création d’une catégorie d’établissement public pour l’ensemble des régions d’outre-mer.
Ses missions ont été définies en tenant compte des recommandations du conseil d’état et du conseil de la concurrence.
S’agissant des composants internes, le choix est fait de ne pas nommer des membres de chambres consulaires dans le conseil d’administration pour éviter tout risque d’atteinte à la concurrence. Les chambres consulaires disposent également de centres de formations.
Dans le même esprit, pour les activités de formation pour les entreprises, les salariés et pour éviter des distorsions de concurrence avec les offreurs privés, la création de filiales pourrait être envisagée, comme l’a recommandé le conseil d’état pour l’AFPA.
Enfin, concernant les conditions de transfert de Guadeloupe Formation vers le nouvel EPIC, il est prévu un droit d’option pour les agents contractuels de droit public, par dérogation au code du travail.
L’établissement public est donc doté d’un statut lui permettant sur le plan opérationnel de bénéficier d’une organisation et d’un fonctionnement souple, innovant et compatible avec les règles de libre concurrence.
Ce mode de gestion permettra de mieux gérer la diversité des statuts des personnels au regard des contraintes du marché (contrats de droit public, contrats de droit privé, contrats de mission, prestations externes, fonctionnaires de l’Etat ou des collectivités territoriales).
L’individualisation du droit à la formation implique l’adaptation et force l’innovation au sein des organismes de formation :
- parcours sur mesure, organisés en modules,
- intégration des nouvelles technologies,
- des offres sous forme de forfait et de qualité répondant au référentiel national unique de certification qualité des organismes de formation.
Le défi de l’établissement, au regard des orientations nationales sur la formation professionnelle, couplées aux perspectives d’emploi dans le cadre de la croissance verte et de la croissance bleue, est de garantir la compétitivité des activités de formation, aussi bien à destination des demandeurs d’emploi, qu’à destination des entreprises dans la gestion de la compétence de leurs collaborateurs.
Ce défi, le conseil d’administration, j’en profite pour remercier et féliciter l’ensemble des élus régionaux qui y siègent et surtout le personnel de Guadeloupe formation, rassuré sur son statut et sur l’avenir de l’établissement, est prêt à le relever en poursuivant la mise en œuvre des dispositifs et mesures de rénovation et de réorganisation enclenchées en 2018 par la direction générale et le collectif des directeurs.
Ce texte devrait nous permettre d’assurer la compétitivité de Guadeloupe Formation, la modernisation de l’offre pédagogique, la prise en compte des métiers émergents ou en tension, la mise en place de formations itinérantes, non modulaires qui ne sont pas forcément pérennes et qui supposent une grande souplesse dans les recrutements.
Ce texte est une étape. Après l’adoption du projet de loi, je proposerai à notre assemblée de prévoir, à l’occasion de la délibération sur les nouveaux statuts, un contrat de performance pour inciter le nouvel EPIC, à mettre en place une nouvelle organisation, à diversifier son activité pour mieux répondre aux besoins des guadeloupéens, à mieux mobiliser les crédits européens.
Pour toutes ces raisons, je vous propose de donner un avis très favorable à cet article 2 du projet de loi.
Je vous propose également de donner un avis favorable aux diverses ordonnances de la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel, avec un amendement à l’ordonnance du 28 août 2019, pour qu’il soit tenu compte des surcoûts liés à notre situation d’archipel et aux difficultés d’accès au logement pour les apprentis.
Je vous propose de donner un avis favorable pour réussir « la formation au service de l’insertion et de l’emploi des guadeloupéens ».
Je vous propose de donner un avis favorable pour :
? Réussir le développement économique touristique. Attirer, moderniser, de nouvelles structures, pour exercer un effet levier sur l’emploi,
? Réussir le défi du plan OCEAN, des nouveaux métiers de la mer autour de la croissance bleue, pour créer de nouveaux emplois: aquaculture, plongée, réparateur naval….
? Réussir le défi de la croissance verte autour des nouveaux enjeux de la production locale (MIR, LIZIN CENTRAL), la souveraineté alimentaire et l’agro-transformation, grand vivier des emplois de demain,
? Réussir le défi, de l’innovation et de la recherche, autour de la Technopole Audacia Caraibes, du centre de formation des métiers de l’aérien (plus de 600000 emplois à pourvoir dans le monde), du déploiement du THD, de la télé-médecine….
Autant de nouveaux projets régionaux qui doivent générer de nouveaux emplois pour de jeunes guadeloupéens bien pris en main par le vaisseau amiral de la formation.
Avant de passer aux autres dispositions du projet de loi, je voudrais citer un extrait de la lettre du directeur général, Camille Galap aux salariés pour leur annoncer « officiellement » son départ pour des raisons personnelles :
« C’est grâce à tout ce potentiel humain au sein de Guadeloupe Formation que les défis de l’orientation, de la formation professionnelle et continue mais également de l’insertion professionnelle seront relevés. Ils répondront aux enjeux du territoire si importants pour les demandeurs d’emplois, les décrocheurs mais également les salariés des entreprises de la Région Guadeloupe. J’espère sincèrement que de très nombreux projets continueront à se développer dans les années à venir. Je souhaite enfin à chacun un accomplissement personnel et professionnel. »
Il devait être avec nous ce matin, mais il est retenu à Paris. Nous serons ensemble, à Guadeloupe Formation Mardi 29 Octobre, pour rencontrer le personnel, les rassurer sur leur avenir, celui de la structure mais aussi écrire ensemble les perspectives pour continuer de changer l’avenir de notre jeunesse.
Merci Camille, pour le travail effectué, pour le courage dont tu as fait preuve durant ces dernières semaines en menant de front tes responsabilités personnelles et professionnelles.
Tous nos vœux t’accompagnent dans les épreuves et je suis sûr d’une chose, Camille Galap est un de CES HOMMES QUI SAVENT FAIRE FACE AU GRAND VENT. Et, c’est dans la tempête, que l’on éprouve et reconnait les « marins de grand temps ».
Durant ces 18 derniers mois, par sa rigueur, sa vision et sa bienveillance, Camille a insufflé de l’enthousiasme, de l’espoir à l’ensemble des collaborateurs de Guadeloupe Formation.
Je lui souhaite la pleine réussite dans ses nouvelles fonctions.