Bordeaux. Mardi 5 novembre 2019. CCN. Les 28 et 30 octobre 2019, les Antillo-Guyanais de Bordeaux, de Paris, et avec eux des locuteurs de la langue dite créole issus d’autres territoires avaient rendez-vous avec jean-Luc Divialle, auteur de “Woucikam”, une thèse qui tend à démontrer la parenté génétique de l’égyptien pharaonique avec la langue dite créole.
Nous étions présents ce 30 octobre dernier,à sa conférence parisienne tenue à la librairie Tamery Sematawy, dans le Xé arrondissement. Au terme d’une tournée intitulée Woucikam tour 2019, le conférencier s’est déclaré heureux de rencontrer ceux d’entre nous, nés ou expatriés en France.
Une chose est sûre, nous n’avons pas étés déçus du déplacement. D’abord, nous n’avons pu que noter la densité des éléments présentés par le conférencier. Nous en avons appris énormément sur les phénomènes linguistiques issus de la préhistoire africaine et qui affectent encore aujourd’hui notre langue.
Jean Luc Divialle a, en cela affiché une grande maîtrise de son sujet. Ensuite, il a beaucoup insisté sur la notion de semantaxe, selon lui, preuve la plus évidente de la non origine française de notre langue encore appelée créole. La semantaxe, cette logique interne par laquelle une communauté humaine commence par associer des sons perçus dans nature à des mots (onomatopées), puis à des phrases, ensuite, à des concepts, jusqu’à aboutir à une langue, se comporterait comme l’ADN.
Elle serait spécifique et ne saurait émaner de sources diverses comme il est généralement dit de notre langue. Deux langues issues d’environnements radicalement opposés comme l’Europe et l’Afrique ne peuvent produire la même pensée symbolique. En conséquence, notre langue qui possède une semantaxe africaine, ne saurait provenir du français.
L’auteur démontre que bon nombre de nos commoditées linguistiques du “créole” se rencontrent déjà dans la vallée du Nil, il y a près de 4500 ans de cela. Il cite notre usage persistant du préfixe “ti” (tikaz, tiloto, tisoulyé, tiponch…), l’usage, en Haïti du nom de la plume pour désigner celui du poil, ou encore le registre du poil pour désigner le chagrin d’amour en Martinique. Tout ceci serait inscrit dans notre pensée symbolique, réputée indélébile au point que nous ne puissions nous en départir.
Quoique tout peuple puisse emprunter librement du vocabulaire à d’autres langues ( au français dans notre cas), la logique par laquelle ce vocabulaire est intégré demeure spécifique et africaine. En conséquence, même si l’on rencontre des individus d’origine européenne parlant nôtre langue, ils demeureront incapables de générer un vocabulaire et des expressions conformes à la semantaxe africaine de cette langue.
Pire, les expressions qu’ils pourraient produire seraient propres à dénaturer la langue, puisque issues du français. Ceci remet donc en question la fameuse théorie des mélanges qui prête à notre langue des origines multiples, massivement européennes, amérindiennes et accessoirement africaines.
Et que penser de l’origine égyptienne de la langue ?
L’auteur, par une démonstration purement mathématique et à l’appui de travaux de linguistes tels Antoine Meillet, Lilias Homburger, Jean-Claude Mboli, révèle que les langues de l’Afrique de l’ouest parlées par les africains déportés dans les possessions françaises d’exploitation sucrière ne constituent qu’une seule forme de langue. Il s’agit du copte, réputé être le dernier stade connu de l’égyptien ancien.
Le conférencier a eu loisir de dresser l’étymologie de certains termes marquants de notre vocabulaire. Il a surtout démontré que certains termes que l’on croît provenir d’un français mal articulé sont en fait, et par leurs formes, plus anciens que l’avènement de ce dernier, qui, bien souvent aurait emprunté ses racines aux langues africaines. Ceci devrait compliquer la tâche des défenseurs d’une origine française ou métisse de nôtre langue.
Enfin, Jean-Luc Divialle a présenté des correspondances troublante entre la grammaire et la conjugaison de l’égyptien ancien et celle de notre langue maternelle. Il a démontré que l’origine de nos traditions peut être appréhendée par ce biais.
En conséquence, la thèse défendue par Jean-Luc Divialle s’annonce révolutionnaire. C’est d’ailleurs le sentiment partagé par une majorité de participants. Invités à se prononcer, en définitive quant à l’origine française de la langue, aucun des votants n’a soutenu l’affirmative. Interrogé sur ce point, Samuel Nzewo, directeur de la librairie Tamery, et habitué des rencontres littéraires de cette tenue parle, du conférencier et de son ouvrage, “Woucikam, origine égyptienne de la langue dite créole, décryptage hiéroglyphique de nos us et coutumes”, comme d’un acte fondateur et porteur pour la communauté panafricaine.
L’auteur, présent que peu de jours en France ne devrait pas tarder à y revenir. C’est en tout cas le souhait de certaines associations qui aimeraient le voir partager ces connaissances avec une majorité de nos ressortissants et particulièrement avec les enfants nés si loin de la terre leurs parents.