Guadeloupe. Dlo Toujou an zyé janmé an Wobiné : Sommes-nous condamnés?
Basse Terre-Capitale. Mardi 4 février 2025.CCN .Le tout nouveau président du SMGEAG F. Louisy a surpris tout le monde par la gravité et la nature de ses propos dans une interview donnée mercredi 29 janvier 2025 soit, trois mois après sa nomination à la tête de ce bateau ivre que constitue le Syndicat Mixte de l’Eau et de l’Assainissement de Guadeloupe. Et pour cause
Les explications détaillées de Marlee
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Alors que ses premières déclarations témoignaient d’une volonté farouche de s’attaquer résolument aux nombreux dysfonctionnements qui gangrènent la structure ; convoquant au passage des partenariats forts et allant jusqu’à exhorter l’implication des usagers eux-mêmes pour y parvenir ; voilà qu’en interne, il doit faire face à une grogne sur fond de couverture sociale insuffisante !
Ça pourrait presque faire sourire si cet énième point d’achoppement ne menaçait pas une nouvelle fois, de prendre en otages les usagers déjà désabusés que nous sommes !
A ce propos, faudrait-il rappeler qu’en trois ans d’existence, le SMGEAG a dépensé plus d’énergie à tenter de régler des problèmes « RH » et financiers (Recrutement, intégration, statuts, salaires …) que d’assurer une véritable politique d’investissement dans les travaux nécessaires à l’amélioration du service public de l’eau dont il a la charge.
Aussi, dans un contexte déjà ultra tendu, le président LOUISY met en garde : « Tout évènement qui contribuerait à grever le budget déjà fragile du syndicat, conduirait inéluctablement à la fermeture de la structure en fin d’année 2025 ! »
Bluff ou probabilité ?
Si nous sommes habitués aux discours chocs et pas forcément suivis d’effets des autorités organisatrices, nous devrions tout de même regarder de plus près ceux du président Louisy eu égard aux différents épisodes pathétiques qui ont émaillé la gestion du syndicat ces derniers mois ; plongeant les plus optimistes d’entre nous dans une grande incertitude quant à l’avenir.
En effet, l’eau c’est un feuilleton au goût amer sur le territoire : Bod lanmè de pli an pli lwen
Pour celui qui ne connaît pas l’historique de la problématique de l’eau en Guadeloupe, nous passerions sans doute pour des fous à la vue de ces mètres cubes du précieux liquide qui se déversent un peu partout, alors même que les robinets des usagers sont souvent désespérément à sec !
Mais nous n’allons pas refaire la genèse de ce qui convient d’appeler désormais une systémie. Car tout le monde est au fait de la situation et de l’effroyable diagnostic de l’impossible solution constamment évoquée, à chaque épisode malheureux (intempéries, pollution, casses…). Une véritable chienlit à durée indéterminée ! :
2018 : A grand coup de publicités, 71 Millions sont annoncés pour un PPI (Plan Pluriannuel d’Investissement) censé mettre fin aux tours d’eau à échéance de 2020. De nombreuses fuites sont réparées par la société Karukéro ; dont une grande partie sur le territoire grande terrien.
Résultats : Toujours autant de tours d’eau ! L’usine de Deshauteurs à Saint-Anne non réparée, le milieu touristique en crise à Gosier et Saint François…. L’eau est toujours aux abonnés absents.
2020 : On fait venir des super professionnels dans le cadre de la mission « Eau de Paris ». Trois années d’assistance pour informatiser la cartographie du réseau notamment en Sud Basse-Terre mais surtout, améliorer « l’accueil et la relation client ». Il faut dire qu’à cette période, les usagers sont sous le coup de nombreuses lettres de relance, de factures exorbitantes, des ATD… Alors même que l’eau ne coule toujours pas au robinet !
2021 : Le SMGEAG est créé avec cette spécificité d’avoir à ses côtés, une Commission de Surveillance. Celle-ci, largement souhaitée par les associations pour garantir la prise en compte des droits et doléances des usagers auprès du Syndicat. Une idée lumineuse mais qui connaîtra d’énormes difficultés de fonctionnement tant l’idée même d’une co-construction semblait inconcevable dans une certaine sphère du comité.
2023 : Nouvelle annonce d’un PPI : 320 Millions dont 218 seraient fléchés pour des travaux spécifiques sur l’ensemble du territoire. Pour quel(s) résultat(s) ? Des améliorations par ci, par-là, malheureusement toujours accompagnées dans le même temps d’une avalanche d’informations relatives à des casses, de fuites recensées çà et là. En définitive des communiqués du SMGEAG qui affluent tous les jours expliquant aux usagers qu’ils n’auront pas d’eau en raison de telle perturbation ici, telle interdiction ou encore tels travaux par là….
En 2024, le taux de perte était identique aux années précédentes toujours en raison des nombreuses fuites identifiées ou supposées sur l’ensemble du réseau.
Les promesses n'engagent que ceux qui y croient : Nou pa ka achté chat an sak
La mise en garde énoncée par le président LOUISY devrait sans doute être prise au sérieux tant les voyants sont au rouge.
Nous avons du mal, en effet, à entrevoir une amélioration de la gestion du syndicat à court ou moyen terme : Il faut mobiliser des fonds pour garantir le nouveau PPI, il faut régler les problématiques internes, il faut établir une véritable culture d’entreprise avec en perspective le retour à la confiance pour l’usager.
Si ce n’est l’Himalaya à gravir, le président Louisy aura fort à faire pour remobiliser ses troupes, les convaincre de la nécessité absolue de “penser gwadloup” en donnant des preuves de bonne gestion, de maîtrise des finances, d’une stratégie clairement caractérisée pour espérer atteindre un seul objectif, l’essentiel : garantir une eau de qualité et en quantité dans le robinet des guadeloupéens.
Et c’est là justement que l’inquiétude atteint des sommets : la problématique de l’assainissement (toujours évoquée au second plan des priorités) est une véritable bombe à retardement. A ce jour, malgré les annonces, nous ne recensons aucun chantier d’envergure portant sur le réseau d’eau usée. Pour rappel, 80 % des stations dysfonctionnent sur le territoire. Nos plages, nos rivières et nos cours d’eau sont de plus en plus pollués. La problématique de la Chlordécone est omniprésente (nous sommes à consommer l’eau dans des seuils de tolérance… un comble !).
Et ce n’est pas en continuant à puiser dans les eaux de surfaces, en occultant des études prospectives permettant d’aller vers d’autres formes de forages notamment que nous pourrons envisager une amélioration durable du service public de l’eau.
Attention le signal serait très mauvais si, comme le craint le président LOUISY, nous perdions la gestion de ce service public, alors même que nous aspirons à nous gérer par nous-mêmes !
Kalkil fèt avan Konté
MarLee